Nicolas Bricas, Cirad, Chaire UNESCO Alimentations du monde
Damien Conaré, Montpellier SupAgro, Chaire UNESCO Alimentations du monde
Le XXe siècle a marqué une rupture dans la manière dont la ville pensait jusqu’ici son alimentation. Dans le modèle préindustriel des « villes organiques », l’espace urbain est totalement façonné par l’alimentation comme en témoignent des lieux tels que le marché ou l’abattoir situés en plein cœur des villes. Les politiques hygiénistes puis les impératifs de sécurité alimentaire dans un monde urbanisé poussent petit à petit l’alimentation et la production agricole en dehors des villes, participant à la distanciation progressive des villes vis-à-vis de leur alimentation. Cette distanciation est multiforme : à la fois géographique, économique, cognitive et politique.
Certaines villes, telles que Toronto ou Belo Horizonte, ont été pionnières de la réappropriation progressive des politiques alimentaires par les acteurs urbains. Le renouveau des politiques alimentaires urbaines dépasse largement le cadre de l’agriculture urbaine et celui de la production alimentaire. Cependant, l’agriculture urbaine a un rôle à jouer dans ce nouveau contexte. Il s’agit moins de nourrir les villes - son potentiel en termes de production reste limité - que de réintroduire la nature et l’agriculture au cœur des villes, tout en recréant du lien social. Une dimension symbolique à ne pas négliger.